Déficit foncier et revente immobilière : les règles à connaître
Le déficit foncier constitue une stratégie fiscale intéressante pour les propriétaires bailleurs. Cependant, la revente d’un bien immobilier ayant généré un déficit foncier doit respecter certaines règles spécifiques. Voici ce que vous devez savoir avant de vendre un bien ayant bénéficié de ce mécanisme fiscal.
Points clés à retenir :
- La règle des 3 ans : obligation de conserver le bien en location pendant au moins 3 ans après imputation du déficit sur le revenu global
- En cas de vente anticipée, les déficits imputés sur le revenu global sont réintégrés dans les revenus imposables
- Des exceptions existent en cas d’invalidité, de licenciement ou de décès
- Le plafond d’imputation du déficit sur le revenu global est de 10 700 € par an (15 300 € dans certains cas)
- L’excédent de déficit reste reportable sur les revenus fonciers des 10 années suivantes
Qu’est-ce que le déficit foncier ?
Le déficit foncier se produit lorsque les charges déductibles d’un propriétaire bailleur dépassent ses revenus locatifs sur une année fiscale. Cette situation peut être particulièrement avantageuse sur le plan fiscal.
Dans le cadre d’un investissement locatif, le déficit foncier correspond à la différence négative entre les revenus fonciers bruts et les charges déductibles engagées pour un bien immobilier mis en location nue.
Pour bénéficier de ce dispositif, il faut remplir les conditions suivantes :
- Être propriétaire d’un bien immobilier donné en location non meublée
- Relever du régime réel d’imposition (pas du micro-foncier)
- Avoir des charges déductibles supérieures aux revenus fonciers générés
- S’engager à maintenir le bien en location pendant une période minimale
La règle des 3 ans : pivot du dispositif
L’article 156-I-3 du Code général des impôts prévoit une condition essentielle concernant le déficit foncier : la règle des 3 ans. Cette disposition stipule que lorsqu’un propriétaire cesse de louer un immeuble ou vend un bien ayant généré un déficit foncier, le revenu foncier et le revenu global des trois années précédant cet événement sont reconstitués.
En pratique, cela signifie que le propriétaire doit conserver le bien en location pendant au moins trois années complètes suivant celle de l’imputation du déficit sur son revenu global. Cette obligation vise à garantir la pérennité de l’investissement locatif et à éviter les stratégies d’optimisation fiscale de court terme.
Exemple concret d’application
Si un déficit foncier est imputé sur les revenus de 2023 (déclarés en 2024), il ne sera définitivement acquis que si le bien est maintenu en location jusqu’au 31 décembre 2026. En cas de vente ou de cessation de location avant cette date, le déficit précédemment déduit sera réintégré au revenu imposable.
Que devient le déficit foncier en cas de vente avant l’expiration du délai ?
La question de la revente d’un bien ayant généré un déficit foncier est cruciale pour les investisseurs. Si un propriétaire vend son bien ou cesse de le louer avant l’expiration du délai de trois ans, les conséquences fiscales peuvent être importantes.
Conséquences fiscales d’une vente anticipée
En cas de non-respect de la règle des 3 ans, l’administration fiscale procède à la remise en cause de l’imputation du déficit foncier sur le revenu global. Concrètement, cela signifie que :
- L’ensemble des déficits précédemment déduits est réintégré dans le revenu imposable
- Le contribuable peut faire l’objet d’un contrôle fiscal portant sur les trois années précédentes
- Un redressement fiscal peut être établi
- Des pénalités et intérêts de retard peuvent s’appliquer
Par exemple, si un déficit de 10 000 € a été imputé en 2023 et qu’une vente intervient en 2025, un contribuable dont la tranche marginale d’imposition est de 30% devra restituer environ 3 000 € (hors pénalités éventuelles).
Les exceptions à la règle des 3 ans
Le législateur a prévu certaines exceptions permettant la vente anticipée d’un bien sans remise en cause du déficit foncier imputé. Ces exceptions concernent des situations indépendantes de la volonté du contribuable :
- Invalidité correspondant au classement dans la deuxième ou troisième catégorie prévue à l’article L. 341-4 du code de la sécurité sociale
- Licenciement du contribuable (à l’initiative de l’employeur)
- Décès du contribuable ou de l’un des époux soumis à une imposition commune
Dans ces cas particuliers, la cession doit toutefois intervenir dans un délai raisonnable suivant la survenance de l’événement.
Événement | Remise en cause du déficit | Conditions |
---|---|---|
Vente avant 3 ans (cas général) | Oui | Réintégration des déficits imputés |
Invalidité (2e ou 3e catégorie) | Non | Vente dans un délai raisonnable |
Licenciement | Non | Vente dans un délai raisonnable |
Décès | Non | Vente dans un délai raisonnable |
Présence d’autres revenus fonciers excédentaires | Non | Si aucun déficit n’a été imputé sur le revenu global |
Distinction entre imputation sur le revenu global et sur les revenus fonciers
Une nuance importante a été apportée par le Conseil d’État dans sa décision du 26 avril 2017 concernant les modalités d’imputation du déficit foncier.
Imputation sur le revenu global
Le déficit foncier peut être imputé sur le revenu global dans la limite de 10 700 € par an (15 300 € pour certains dispositifs spécifiques). Cette imputation permet de réduire l’assiette imposable de l’ensemble des revenus du contribuable.
C’est cette imputation qui est soumise à la règle des 3 ans. En cas de non-respect de cette règle, le montant déduit est réintégré dans les revenus imposables.
Imputation sur les revenus fonciers
La partie du déficit foncier qui excède 10 700 €, ainsi que celle relative aux intérêts d’emprunt, est uniquement imputable sur les revenus fonciers des dix années suivantes.
Selon la jurisprudence du Conseil d’État, même en cas de vente avant le délai de 3 ans, le contribuable conserve la possibilité de reporter son déficit sur ses revenus fonciers provenant d’autres biens immobiliers jusqu’à la dixième année qui suit la création du déficit.
« Le contribuable qui cède un immeuble ou cesse de le donner en location avant l’expiration du délai de trois ans […] ne perd pas pour autant la faculté d’imputer le déficit foncier correspondant aux revenus fonciers des années suivantes. » (Conseil d’État, 26 avril 2017)
Cas particulier des travaux de rénovation énergétique
La limite annuelle d’imputation sur le revenu global des déficits fonciers est rehaussée à 21 400 euros pour les dépenses de travaux de rénovation énergétique permettant à un bien qualifié de « passoire thermique » de passer d’une classe énergétique E, F ou G à une classe A, B, C ou D.
Ce dispositif s’applique pour les dépenses effectuées entre le 1er janvier 2023 et le 31 décembre 2025, avec un devis accepté à partir du 5 novembre 2022. En cas de vente du bien, la règle des 3 ans s’applique également à ces déficits majorés.
Recommandations pratiques pour les investisseurs
Si vous envisagez de vendre un bien ayant généré un déficit foncier, voici quelques recommandations :
- Vérifiez la date limite de conservation du bien avant de le mettre en vente
- Calculez l’impact fiscal d’une éventuelle réintégration du déficit
- Si vous possédez plusieurs biens locatifs, évaluez si votre situation globale vous permet d’éviter une réintégration (bénéfices fonciers supérieurs aux déficits)
- Consultez un expert fiscal pour une analyse personnalisée de votre situation
- Conservez les pièces justificatives de vos charges et de vos déficits pendant au moins 6 ans
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